- Entendre ordonner la résolution de la vente
intervenue entre les parties, aux torts et griefs exclusifs de la
défenderesse ;
- Entendre condamner la défenderesse à
payer à la demanderesse une somme de (...) en principal,
à titre de dommages et intérêts,
à majorer des intérêts
judiciaires au taux légal à dater du (...) ;
- Entendre condamner la défenderesse à
payer à la demanderesse une indemnité de procédure
évaluée ex-aequo et bono à la somme de 1.200 € ;
- Entendre condamner la défenderesse aux
entiers dépens de l’arbitrage, ainsi qu’aux autres frais et
dépens de la procédure.
La demande reconventionnelle tend à :
- Entendre prononcer l’annulation de la vente
intervenue entre les parties ;
- Entendre
condamner la demanderesse à payer à la
défenderesse une somme de 7.500 € en principal, à majorer
des intérêts judiciaires
au taux légal à dater du (...) ;
- Entendre condamner la demanderesse à payer
à la défenderesse une indemnité de
procédure évaluée ex-aequo et bono à la
somme de 1.250 € ;
- Entendre condamner la demanderesse aux entiers
frais et dépens de l’arbitrage.
II. EN FAIT
La présente procédure concerne l’exécution d’une
vente conclue entre les parties, le (...).
1. La demanderesse est propriétaire d’un
ensemble immobilier situé(...) Cet ensemble immobilier est
composé de trois « blocs » (...) :
2. Le (...), la demanderesse a introduit une demande
de permis de lotir auprès de l’administration communale (...),
en vue de pouvoir procéder
à la division du bloc A précité en deux lots
destinés à la construction d’habitations.
Par délibération du (...), le Collège a
délivré à la demanderesse le permis de lotir
demandé. Le dispositif de la délibération
est rédigé comme suit :
« (…) Le permis de lotir sollicité par
la (...) est octroyé. Le titulaire du permis devra :
1. Respecter les devis émis par les compagnies
distributrices (…).
2. Respecter le rapport établi par le service
incendie.
3. Respecter le cahier des prescriptions
urbanistiques corrigées.
4. Prendre contact avec le service « Etudes et
travaux » (…) en ce qui concerne l’équipement du
lotissement dans un délai de un mois à dater
du présent permis afin
d’introduire un dossier technique ; Les frais pour l’examen de ce
dossier étant réclamés par le service «
Etudes et travaux »
et payables avant l’examen dudit
dossier.
5. De n’introduire aucun permis d’urbanisme avant
l’établissement du procès-verbal de réception
provisoire des travaux d’équipement du lotissement ».
3. En mai (...), la demanderesse a
décidé de vendre deux parties de l’ensemble immobilier
dont elle est propriétaire, à savoir l’immeuble
d’habitation
érigé sur le bloc B
précité, et un des deux lots à bâtir
résultant de la division du bloc A précité.
En vue de la commercialisation de ces biens, la demanderesse a fait
appel aux services d’une agence immobilière, s’agissant de (...).
En exécution de sa mission, l’agence immobilière (...) a
fait la publicité des biens à vendre.
Pour ce qui concerne l’immeuble d’habitation, la publicité
réalisée par l’agence indiquait que le prix de mise en
vente était de (...).
Pour ce qui concerne le terrain à bâtir, mis en vente
à un prix de (...), la publicité réalisée
indiquait :
« Cette parcelle de terrain à bâtir pour villa 4
façades offre une surface de (…).
L’équipement est complet et il ne vous reste plus qu’à
implanter
sur le terrain de votre choix la maison de vos rêves (…) ».
4. Le (...), Monsieur (...), compagnon de la
défenderesse, a effectué une première visite, en
présence d’un représentant de l’agence immobilière
(...).
Le (...), la défenderesse et son compagnon ont effectué
une deuxième visite, toujours en présence d’un
représentant de l’agence immobilière (...).
Le (...), la défenderesse a formulé une offre d’achat
portant sur les deux biens mis en vente, pour un prix global de (...),
et ce sur un document
établi par l’agence immobilière(...).
Le (...), la demanderesse a retourné à Madame (...) ce
document, en formulant une contre-proposition de vente pour un prix
global de (...).
Le même jour, cette contre-proposition fût acceptée
par la défenderesse.
Suivant les termes de l’offre d’achat de la défenderesse ayant
été acceptée par la demanderesse, les parties
s’étaient engagées à signer un compromis
de vente endéans un délai de dix jours, et à
procéder à la passation de l’acte authentique de vente
endéans trois mois à dater de la signature du compromis
de vente.
L’offre d’achat stipule également que la défenderesse
s’engageait à payer une somme équivalente à 10% du
prix de la vente, soit une somme de (...),
lors de la signature du compromis de vente.
Enfin, l’offre stipule encore que la défenderesse ne demandait
pas l’insertion d’une clause suspensive relative à l’obtention
d’un prêt hypothécaire.
5. Suivant la demanderesse (...), le (...), la
défenderesse et son compagnon ont effectué une nouvelle
visite des biens, en présence d’un entrepreneur,
d’un architecte, et d’un représentant de l’agence
immobilière (...). Ceci n’est pas contesté par la
défenderesse.
Suite à un entretien téléphonique du même
jour, par fax du (...), l’agence immobilière (...) transmettait
à la défenderesse les prescriptions urbanistiques
et le permis de lotir relatif au terrain à bâtir
précité.
6. Le (...), la défenderesse s’adressait
à l’agence immobilière (...), dans les termes suivants :
« (…) Suite à l’entretien téléphonique de ce
jour, nous vous confirmons que nous ne serons pas présents en
vos bureaux (...) pour vous remettre
les sommes de : (...) pour l’achat du terrain, (...) pour l’achat de la
maison, et pour la signature des deux compromis chez notre notaire le
jeudi (...).
Nous souhaitons l’annulation de l’offre d’achat signée le (...)
pour un montant de (...) dans les 48 heures, à défaut
nous enverrons ce fax
au Président de la Chambre d’Arbitrage et de Médiation
(...). De plus, vous ne nous avez jamais fourni la preuve que le
vendeur
avait bloqué la somme de (...) à la Commune (...) pour
effectuer les différents travaux (raccords aux égouts, au
gaz, …, ainsi que le déplacement du chemin
attenant à la maison qui était à la charge
de la venderesse. En espérant avoir rapidement de vos
nouvelles ».
La défenderesse manifestait donc sa volonté de refuser de
poursuivre l’exécution de la vente et de signer le compromis de
vente.
Le (...), suite à la réception du fax
précité, l’agence immobilière (...) s’adressait
à la défenderesse dans les termes suivants :
« (…) Auriez-vous l’amabilité de noter que (...)
l’offre acceptée ne fût pas assortie de réserves.
Il n’a jamais été question de
constituer une garantie sur travaux en-dehors des conditions
légales.
La vente étant parfaite, en raison de l’acceptation de l’offre,
nous vous invitons solennellement à honorer vos engagements et
à passer le compromis
sous huit jours, à défaut de quoi la Chambre d’Arbitrage
et de Médiation sera saisie ».
Par fax du (...), le conseil de la défenderesse s’adressait
à l’agence immobilière (...) en écrivant, entre
autres, que la défenderesse n’avait pas été
informée
préalablement à la vente de ce que des travaux
d’équipement du lotissement devaient encore être
réalisés par la demanderesse.
Par un fax du même jour, l’agence immobilière (...)
répondait au conseil de la défenderesse.
7. Aucun compromis de vente ne fut signé et
aucun règlement amiable n’a pu être dégagé
entre les parties.
(...)
III. EN DROIT
(...)
A. THESES EN PRESENCE
A.1. Thèse de la demanderesse
La partie demanderesse considère qu’en refusant de poursuivre
l’exécution de la vente, la défenderesse a commis une
faute justifiant la résolution
de cette vente et la condamnation de la défenderesse au paiement
d’une indemnité équivalente à 10 % du prix de la
vente, soit une somme de (...).
Quant à l’évaluation de l’indemnité
précitée, la demanderesse s’en réfère
à la clause reprise dans l’offre d’achat et stipulant que :
« l’offrant versera au compromis de vente une somme de 10% du
prix de vente convenu, soit (…).
Ce montant de 10% ne sera pas restitué en cas de
désistement de l’offrant quels que soient les modes d’action du
propriétaire (…) »
(notons que la somme de (...) à laquelle il est fait
référence avait été
déterminée en considération du montant de l’offre
d’achat initiale pour un prix de (...)).
En tout état de cause, la demanderesse considère que
l’indemnité due par la défenderesse peut être
évaluée à 10% du prix de la vente.
A.2. Thèse de la défenderesse
1. La défenderesse considère que la
vente doit être annulée en raison d’un vice ayant
affecté son consentement, s’agissant d’une erreur sur les
conditions
substantielles de la vente, et ce par application des articles
1109 et 1110 du Code civil.
Elle considère, sur cette base, que la demanderesse doit
être condamnée à lui payer des dommages et
intérêts évalués à 7.500 €,
en réparation du préjudice subi suite à
l’annulation de la vente.
2. La défenderesse considère
également que la vente doit être annulée, en ce que
son objet est illicite. Suivant la défenderesse,
l’illicéité de l’objet de la vente
découle de l’illégalité du permis de lotir
délivré par la commune (...), le (...).
3. A titre subsidiaire, la défenderesse conteste devoir
procéder au paiement d’une indemnité équivalente
à 10 % du prix de la vente, soit une somme de (...).
La défenderesse considère en effet que la clause
invoquée par la demanderesse ne trouve pas à s’appliquer
en l’espèce, et qu’en toutes hypothèses
cette clause est illégale.
B. SUR LE VICE DE CONSENTEMENT – ERREUR SUR LES CONDITIONS
SUBSTANTIELLES DE LA VENTE
1. Position de la défenderesse :
Comme exposé ci-avant, la défenderesse considère
que la vente doit être annulée en raison d’un vice ayant
affecté son consentement,
s’agissant d’une erreur sur les conditions substantielles de la vente,
et ce par application des articles 1109 et 1110 du Code civil.
La défenderesse expose que c’est en raison d’une absence
d’information quant aux travaux d’équipement du terrain à
bâtir vendu qu’elle a été induite en erreur.
La défenderesse expose également que les modalités
d’exécution de ces travaux d’équipement constituaient des
conditions substantielles de la vente.
Or, la défenderesse relève que :
- La publicité réalisée pour la
mise en vente du terrain à bâtir mentionnait que
l’équipement du terrain était complet, alors que ce
n’était pas le cas.
- Elle n’avait pas été informée
de ce que, conformément aux conditions du permis de lotir, la
demanderesse devait prendre contact avec le service travaux,
endéans un mois à dater de la délivrance du permis
de lotir, pour soumettre un dossier technique d’exécution des
travaux d’équipement. Lors de la vente,
ces démarches n’avaient pas été accomplies.
- Elle ne pouvait savoir endéans quels
délais les travaux d’équipement seraient
réalisés et si la demanderesse en supporterait le
coût.
2. Position de la demanderesse :
Pour sa part, la demanderesse expose que, lors de la vente, la
défenderesse savait que des travaux d’équipement devaient
encore être exécutés,
endéans quels délais ils seraient réalisés,
et que c’est la demanderesse qui en supporterait le coût.
A cet égard, la demanderesse expose que :
- La défenderesse avait obtenu des
informations quant aux travaux d’équipement à
exécuter, avant la vente.
- La défenderesse s’est rendue à
plusieurs reprises sur les lieux et a donc pu constater que les travaux
d’équipement n’avaient pas encore été
réalisés.
- La défenderesse savait que le coût des
travaux d’équipement serait à charge de la
demanderesse puisque suivant les termes de son fax du (...), elle fait
référence
au « déplacement du chemin attenant à la
maison à charge du vendeur ».
- Avant la vente, la défenderesse n’a jamais
demandé d’informations quant aux délais endéans
lesquels ces travaux seraient exécutés.
3. Position de l’arbitre – discussion :
3.1.
A l’instar de la défenderesse, l’arbitre relève
qu’initialement, la publicité réalisée pour la
mise en vente du terrain à bâtir indiquait que «
l’équipement est complet »,
alors que ces travaux n’avaient pas été
exécutés.
L’arbitre considère en outre qu’il n’est pas établi que
la demanderesse a communiqué à la défenderesse
l’intégralité des informations relatives aux travaux
d’équipement à exécuter pour le terrain à
bâtir vendu.
3.2.
Toutefois, il faut s’interroger sur la portée de l’erreur
invoquée par la défenderesse, quant à son
caractère excusable et quant à son caractère
substantiel.
3.2.1. En l’espèce, il apparaît
qu’à tout le moins (...), la défenderesse avait
été informée de ce que les travaux
d’équipement devaient encore être réalisés.
En effet, suivant les termes du fax qu’elle adressait à l’agence
immobilière (...), le (...), la défenderesse manifestait
sa volonté de ne pas poursuivre
l’exécution de la vente en écrivant :
« (…) Suite à l’entretien téléphonique de ce
jour, nous vous confirmons que nous ne serons pas présents en
vos bureaux (...) pour vous remettre
les sommes de : (...) pour l’achat du terrain, (...) pour l’achat de la
maison, et pour la signature des deux compromis chez notre notaire le
jeudi (...).
Nous souhaitons l’annulation de l’offre d’achat signée le (...)
pour un montant de (...) dans les 48 heures, à défaut
nous enverrons ce fax
au Président de la Chambre d’Arbitrage et de Médiation
(...). De plus, vous ne nous avez jamais fourni la preuve que le
vendeur
avait bloqué la somme de (...) à la Commune (...) pour
effectuer les différents travaux (raccords aux égouts, au
gaz, …, ainsi que le déplacement du chemin
attenant à la maison qui était à la charge
de la venderesse. En espérant avoir rapidement de vos
nouvelles ».
Le refus de poursuivre l’exécution de la vente était donc
essentiellement motivé par le refus de la défenderesse de
payer (...).
La défenderesse ne justifiait pas sa position en écrivant
qu’elle aurait ignoré que des travaux d’équipement
devaient encore être réalisés, puisqu’elle
invoquait
exclusivement le fait qu’elle n’avait pas obtenu la preuve de la
constitution d’une garantie auprès de l’administration quant
à l’exécution des travaux.
Ce faisant, la défenderesse reconnaissait d’ailleurs qu’elle
avait été informée de ce que des travaux devaient
être exécutés.
La défenderesse ne pourrait donc soutenir qu’elle aurait
été induite en erreur du fait qu’elle n’aurait pas obtenu
communication de toutes les informations
relatives aux travaux d’équipement à exécuter pour
le terrain à bâtir vendu.
En réalité, les conditions de la vente sur lesquelles la
défenderesse pourrait avoir été induite en erreur
portaient sur la prise en charge du coût des travaux
et sur les délais endéans lesquels les travaux seraient
exécutés, et non sur le fait même que les travaux
d’équipements devaient encore être exécutés.
En termes de troisièmes conclusions additionnelles et de
synthèse, la défenderesse écrit en ce sens :
« qu’il tombe sous le sens commun que Madame (...),
comme tout acheteur raisonnablement prudent et diligent, entendait
acquérir conjointement deux biens immobiliers pour lesquels les
aménagements
devaient être supportés par le vendeur avec la certitude
que ces travaux seraient tout prochainement exécutés
» (...).
3.2.2. Or, la défenderesse aurait pu
recueillir toutes les informations utiles, et recueillir tous ses
apaisements, en invitant la demanderesse à lui confirmer
sa position quant à la prise en charge du coût des travaux
et aux délais endéans lesquels les travaux seraient
exécutés.
Elle n’a cependant jamais interrogé formellement la demanderesse
à cet égard, alors que la demanderesse n’a jamais
contesté devoir exécuter les travaux
d’équipement à ses frais avant l’entrée en
jouissance, fixée à la signature de l’acte authentique.
A supposer que la défenderesse puisse invoquer une erreur, il
faut donc considérer qu’il s’agit d’une erreur inexcusable qui
ne peut fonder sa demande
d’annulation de la vente.
3.2.3. A titre surabondant, quant au caractère
substantiel de l’erreur invoquée par la défenderesse, il
est constant que « l’erreur, pour donner ouverture
à nullité doit porter sur la substance même
de la chose, sur les qualités substantielles de celle-ci (…)
», et que « ces qualités substantielles ne doivent
pas
être déterminées théoriquement, mais in
concreto, eu égard au contrat tel qu’il a été
envisagé par les parties » (...).
En l’espèce, les termes du fax de la défenderesse du
(...) et le fait qu’elle se soit abstenue d’inviter la demanderesse
à l’informer quant à la prise en charge
du coût des travaux d’équipement et quant aux
délais d’exécution de ces travaux, permet de douter qu’il
s’agissait de conditions substantielle de la vente
pour la défenderesse.
Il faut également relever que ces éléments ne
concernaient que le terrain à bâtir vendu, et non
l’immeuble d’habitation vendu.
Or, en prenant comme référence les prix de mise en vente
initiaux, le terrain à bâtir ne représentait que
24% du prix global de la vente.
Le coût des travaux d’équipement ne représentant
quant à lui qu’une quote-part du prix d’acquisition du terrain
à bâtir vendu,
il faut considérer que l’erreur invoquée par la
défenderesse n’est pas substantielle et ne peut donc fonder sa
demande d’annulation de la vente.
C. SUR L’ILLEGALITE DE L’OBJET DE LA VENTE
1. Position de la défenderesse :
Comme exposé précédemment, la défenderesse
considère que la vente doit être annulée, en ce que
son objet est illicite.
Suivant la défenderesse, l’illicéité de l’objet de
la vente découle de l’illégalité du permis de
lotir délivré par la commune (...), le (...).
A cet égard, la défenderesse considère qu’il
appartient à l’arbitre de se prononcer quant à
l’illégalité de ce permis de lotir, par application
de l’article 159 de la Constitution.
Les moyens soulevés par la défenderesse pour conclure
à l’illégalité de ce permis de lotir sont, en
synthèse, les suivantes :
violation de l’article 170 du décret wallon du 11 mars 1999
relatif au permis d’environnement et de l’article 6 du décret
wallon du 11 septembre 1985
sur l’évaluation des incidences sur l’environnement / violation
de la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation formelle des actes
administratifs /
caractère illicite des conditions assortissant le permis de
lotir.
2. Position de la demanderesse :
La demanderesse considère que le permis de lotir est
légal et que, quand bien même il serait illégal,
cette illégalité ne permettrait pas à la
défenderesse
de postuler l’annulation de la vente.
3. Position de l’arbitre – discussion :
3.1. L’article 159 de la Constitution dispose que :
« Les cours et tribunaux n’appliquent les arrêtés et
règlements généraux, provinciaux et locaux,
qu’autant qu’ils seront conformes aux lois ».
Sur cette base, il est constant que toute juridiction a le pouvoir et
le devoir de vérifier la conformité à la loi des
arrêtés et règlements sur lesquels
une demande, une défense ou un exception est fondée
(cfr., entre autres : Cass., 26 février 1980, Pas., 1980, I, p.
774).
En cas de non-conformité à la loi, le juge peut donc
refuser d’appliquer tant les actes administratifs individuels que les
actes administratifs réglementaires
(...).
Ces principes s’appliquent bien évidemment à la
procédure arbitrale, dès lors que l’arbitre statue selon
les règles de droit, conformément à
l’article 1700, alinéa 1er du Code judiciaire.
3.2. Pour que le contrôle institué par
l’article 159 de la Constitution trouve à s’appliquer, il faut
que l’arbitre soit saisi d’une demande,
d’une défense ou d’une exception fondée sur l’application
d’un acte administratif.
Il faut donc que l’arbitre soit saisi d’un litige relatif à des
droits subjectifs découlant de l’application d’un acte
administratif.
Ainsi, par exemple, l’arbitre devra faire application de l’article 159
de la Constitution, lorsque la demande dont il est saisi se fonde sur
l’application
d’un arrêté, d’un règlement, d’une autorisation
administrative, (…), et que le litige opposant les parties porte sur
les droits subjectifs découlant
de l’acte administratif concerné.
La Cour de cassation précise d’ailleurs que sa censure, quant
à une violation éventuelle de l’article 159 de la
Constitution, ne peut trouver à s’appliquer
que si le juge a fait application de l’acte administratif dont la
légalité est incriminée (Cass., 9 septembre 2002,
JLMB, 2003/27, 1179, et note de D. DE ROY).
3.3. En l’espèce, l’arbitre est saisi d’un
litige concernant l’exécution d’une vente sous seing
privé intervenue entre les parties.
L’arbitre n’est saisi d’aucun litige quant à l’application de
droits subjectifs découlant d’un acte administratif.
Plus particulièrement, l’arbitre n’est saisi d’aucun litige
quant à l’application des droits subjectifs découlant du
permis de lotir dont la légalité est
incriminée par la défenderesse.
Ainsi, ni la demanderesse, ni la défenderesse, n’ont
formulé une demande, une défense ou une exception
fondée sur l’application des droits subjectifs
découlant de ce permis de lotir.
L’arbitre n’étant pas saisi de l’application de ce permis de
lotir, il n’a pas à contrôler sa légalité,
l’article 159 de la Constitution ne trouvant pas
à s’appliquer en l’espèce.
Il ne peut donc être considéré que l’objet de la
vente serait illégal au motif que le permis de lotir serait
illégal – cette illégalité étant par
ailleurs
contestée par la demanderesse.
3.4. Au surplus, et à titre surabondant,
l’arbitre relève que l’illégalité du permis de
lotir invoquée par la défenderesse ne pourrait lui causer
aucun préjudice.
Il s’agit en effet d’un permis de lotir exécutoire, pour lequel
les délais d’exercice des voies de recours auprès du
Conseil d’Etat sont épuisées.
La défenderesse n’invoque d’ailleurs aucun préjudice qui
pourrait lui être directement causé par
l’illégalité du permis de lotir qu’elle invoque.
En considération des éléments exposés
ci-avant, il faut considérer que la demande reconventionnelle
tendant à l’annulation de vente doit être
déclarée non fondée.
D. SUR LA RESOLUTION DE LA VENTE
En considération des éléments exposés
ci-avant, il faut considérer qu’une vente parfaite est
valablement intervenue entre les parties,
un accord étant intervenu quant au prix et quant à la
chose vendue, le (...).
En refusant de poursuivre l’exécution de la vente, sans motif
valable, la défenderesse a donc commis un manquement contractuel
justifiant
la résolution de la vente à ses torts et griefs exclusifs.
E. SUR L’INDEMNITE POSTULEE PAR LA DEMANDERESSE
1. Position de la demanderesse
La demanderesse postule la condamnation de la défenderesse
à lui payer une somme équivalente à 10% du prix de
la vente, soit (...), en invoquant
l’application d’une clause de l’offre d’achat stipulant que : «
l’offrant versera au compromis de vente une somme de 10% du prix de
vente convenu,
soit (…). Ce montant de 10% ne sera pas restitué en cas de
désistement de l’offrant quels que soient les modes d’action du
propriétaire (…) »
(notons que la somme de (...) à laquelle il est fait
référence avait été
déterminée en considération du montant de l’offre
d’achat initiale pour un prix de (...).
En tout état de cause, la demanderesse considère que
l’indemnité due par la défenderesse peut être
évaluée à 10% du prix de la vente.
2. Position de la défenderesse
Pour sa part, la défenderesse considère que cette
indemnité ne peut être évaluée par
référence à la clause contenue dans l’offre
d’achat précitée,
dès lors que cette clause prévoit la non restitution
d’une somme équivalente à 10 % du prix de la vente
à payer lors de la signature du compromis de vente,
et qu’en l’espèce, aucun compromis de vente n’a
été signé et aucune somme n’a été
payée par la défenderesse.
D’autre part, la défenderesse considère que la clause
précitée constitue une clause pénale devant
être annulée sur la base des articles
32, 15°-21°, et 33 §1er alinéa 1er de la loi du 14
juillet 1991 sur les pratiques du commerce et la protection des
consommateurs.
En outre, et en toute hypothèse, la défenderesse
considère que cette clause pénale doit être
réduite par application de l’article 1231 du Code civil.
Enfin, pour l’hypothèse où la clause stipulée dans
l’offre d’achat serait qualifiée de clause de dédit, la
défenderesse considère que cette clause
doit être annulée sur la base des articles 32, 24° et
33 § 1er alinéa 1er de la loi du 14 juillet 1991 sur les
pratiques du commerce et la protection des consommateurs.
A titre infiniment subsidiaire, la défenderesse s’en
réfère également à l’application des
articles 6 et 1134 alinéa 3 du Code civil.
3. Position de l’arbitre - discussion
3.1. L’arbitre considère qu’eu égard
à sa rédaction, la clause invoquée par la
demanderesse ne peut être appliquée en l’espèce.
Cette clause prévoit en effet la non restitution de l’acompte
versé et non la condamnation au paiement d’une indemnité
dans l’hypothèse d’un désistement
avant le paiement de l’acompte, comme en l’espèce.
3.2. Il n’en demeure pas moins que la demanderesse
est fondée à postuler le paiement d’une indemnité
à charge de la défenderesse,
la vente devant être résolue à ses torts et
griefs exclusifs, et ce conformément à l’article 1184 du
Code civil.
Qu’en l’espèce, l’arbitre considère que,
conformément aux usages applicables en matière de vente
immobilière, l’indemnité due par la défenderesse
peut être évaluée à une somme
équivalente à 10% du prix de la vente, soit une somme de
(...).
------------
En considération des éléments exposés
ci-avant, l’arbitre considère que la demande principale doit
être déclarée recevable et fondée
dans la mesure indiquée ci-après, au dispositif de la
présente.
------------
PAR CES MOTIFS
(...)
Déclare la demande principale recevable et fondée dans la
mesure ci-après indiquée ;
Ordonne la résolution de la vente intervenue entre les parties,
le (...), aux torts et exclusifs de la défenderesse ;
Condamne la défenderesse à payer à la demanderesse
une somme de(...) en principal, à titre d’indemnité,
à majorer des intérêts judiciaires
au taux légal à dater du (...) ;
(...)
Condamne la défenderesse à payer à la demanderesse
une indemnité de procédure évaluée ex-aequo
et bono à la somme de (...) ;
Déclare la demande reconventionnelle recevable mais non
fondée ;