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JURISPRUDENCE
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DROIT DES OBLIGATIONS
Sentence du 23 juin 2006
I / A
La présente
instance a pour cadre la convention de bail précitée, en
vertu de laquelle la
partie demanderesse
a donné en location à la partie défenderesse une
surface à
usage de bureaux située (...) ;
I.
Exposés
et arguments des parties
La partie
demanderesse fait état de ce que la partie défenderesse
accuse un arriéré de 11
mois de loyers
(avril, novembre et décembre 2004, janvier, mars, avril,
novembre et décembre 2005, janvier, février et mars
2006),
soit un montant de
5.493,69 €, et de ce que ses mises en demeure et tentatives de
conciliation
sont restées
sur ce point sans suite ;
Elle ajoute que
la partie défenderesse, par ailleurs, d’une part est en
défaut de payer les
charges d’eau des années
2004 et 2005, d’un import de 264 €, en dépit de
nombreux envois recommandés, ainsi que l’indexation depuis
mai 2004, soit
548,78 €, d’autre part n’a pas constitué la garantie locative
stipulée à
l’article 13 du bail, d’autre part encore,
n’a pas entretenu la chaudière
conformément à l’article 9 de la convention ;
La partie
demanderesse indique qu’à la suite d’une inondation dans
l’immeuble, elle a dû
faire face à de grosses
réparations et mettre l’ascenseur hors d’usage quelques
semaines pour des raisons de sécurité, et estime que le
fait
pour la partie
défenderesse de se déplacer pendant quelques semaines
sans ascenseur jusqu’au
troisième étage n’est
pas constitutif d’un préjudice, d’autant que le bail ne
contient pas de clause comprenant la présence obligatoire
d’un
tel
ascenseur ;
Elle signale,
par ailleurs, que la clause particulière figurant au bail, selon
laquelle le
nettoyage ainsi que les charges
communes sont compris dans le loyer, ne révèle
aucune intention commune des parties d’intégrer dans ledit loyer
(qui est de
495,79 € par mois) un nettoyage des lieux loués en vertu de la
convention ;
Pour elle,
ladite clause doit être interprétée eu égard
à la nature et au but du contrat,
au sens qui est communément
attribué aux termes et expressions dans le secteur
d’activité concerné et à l’interprétation
que des clauses semblables
peuvent
avoir déjà reçue, aux usages, ainsi qu’aux
exigences de la bonne foi ;
<>Elle affirme
qu’outre la circonstance qu’il n’y a pas eu de commune intention des
parties
d’inclure le nettoyage
des lieux loués dans le loyer, une telle intégration ne
ressort ni des usages, ni de la pratique ;
Elle soutient
que le nettoyage visé par la clause particulière porte
sur celui des parties
communes, les charges communes
étant comprises dans le loyer ;
Compte tenu de
ce qui précède, la partie demanderesse postule,
sollicitant que son action soit
déclarée recevable et fondée :
·
La condamnation de la partie
défenderesse au
paiement de l’arriéré de loyers de 5.453,69 €, à
majorer des intérêts
conventionnels
de 12 pour cent l’an, de 569,93 €, ainsi qu’au paiement de
l’arriéré
d’indexation, de 548,78 €,
soit au total 6.572,40 € ;<>
Sur le fond, la
partie défenderesse affirme que la partie demanderesse ne
respecte pas ses
obligations depuis le début
de la location, notamment en ce qui concerne
l’exécution de certains travaux convenus verbalement entre
parties
(niés par la
partie demanderesse à l’audience du 31 mai 2006) ;
Elle indique que
la partie demanderesse n’a donné aucune suite à un
courrier qu’elle lui adressa
le 30 janvier 2004, rédigé
après plusieurs réclamations verbales et des
promesses non tenues, par lequel elle lui rappelait certains
manquements ;
Elle énonce,
parmi les manquements qu’elle impute à la partie demanderesse,
l’inexécution, à
partir de janvier 2002,
du nettoyage des locaux loués, en contravention avec la
clause particulière du bail selon laquelle le nettoyage est
compris dans le
loyer, ainsi que les charges communes, le nettoyage ayant
été,
de juillet à
décembre 2001 effectué
par le concierge de
l’immeuble ;
Elle signale que
cette carence l’a conduite à faire appel aux services d’une
femme d’ouvrage et
répondre ainsi à ses obligations
en matière de sécurité et d’hygiène sur les
lieux de travail, en l’attente d’une solution négociée,
et dont elle a réclamé
vainement
à la partie demanderesse le remboursement des frais à
l’occasion d’un
courrier adressé le 25 avril 2005, par lequel elle
lui rappelait
ses
obligations contractuelles ;
Elle indique
qu’en date du 8 août 2005, elle a adressé à la
partie demanderesse un courrier
relatant de nouveaux manquements
contractuels, lui signalant le
non-fonctionnement de l’ascenseur, de la lumière des escaliers
et des sonnettes
et ouvre-porte
de l’immeuble depuis le 1er juin 2005, et la mettant
en demeure d’effectuer les réparations nécessaires sous
peine d’une
suspension du paiement du loyer jusqu’à satisfaction de ses
revendications ;
La partie
défenderesse expose que la partie demanderesse n’y ayant pas
donné suite, elle
a pris la décision de
suspendre le paiement du loyer à partir du 1er
novembre 2005, ce qui a poussé la partie demanderesse à
effectuer les
réparations nécessaires et rétablir le
fonctionnement normal de l’ascenseur, de
la lumière de la cage d’escalier et
de l’ouvre-porte à
partir de la mi-décembre
2005, le parlophone étant, lui, toujours en panne ;
Elle ajoute que
les dysfonctionnements qu’elle décrits ont fortement
perturbé ses activités et
plus particulièrement
ses rapports avec ses clients et ses visiteurs ;
Après avoir rejeté
la réclamation des charges d’eau, au motif que le bail ne
prévoit aucune
intervention de sa part
dans les frais de consommation d’eau de ville, elle se
déclare, à l’audience du 31 mai 2006, disposée
à payer ces charges
sur
production d’une pièce justificative probante ;
Elle sollicite,
sur le fond, à titre reconventionnel :
La
condamnation de la partie
demanderesse à
respecter ses engagements contractuels et notamment à assurer
le
nettoyage de ses locaux, à assurer le bon
fonctionnement des parties communes
de l’immeuble
(ascenseur,
électricité de la cage d’escaliers,
ouvre-porte et parlophone),
ainsi que le nettoyage de celles-ci ;
La condamnation de
la partie
demanderesse à lui
payer la somme de 10.200 € représentant les frais de nettoyage
déboursés par
elle de janvier 2002 à mars 2006, soit 51 mois à 200 €
par mois ;
La
condamnation de la
partie demanderesse au
paiement d’une somme estimée à 10.000 € à titre de
dommages-intérêts
en raison
du non-fonctionnement de la sonnette et de l’ouvre-porte qui ont
empêché
l’accès des bureaux aux
clients et visiteurs durant la
période courant du 1er
juin 2005 au 15 décembre 2005 ;
(...)
Par ailleurs, la
partie défenderesse produit à l’audience du 31 mai 2006
la preuve du paiement
des loyers des mois
de décembre 2004 et avril 2005 ;
II.
Décision
(...)
Sur
le fond, il ne fait pas de
doute, aux yeux du tribunal, que dans la clause particulière
litigieuse du
bail, libellée
comme suit : « nettoyage
compris dans le loyer ainsi que les charges communes »,
les parties
ont visé
par le mot « nettoyage » celui des parties
communes, les
termes « ainsi que les charges communes » devant
alors
s’entendre des
autres charges relatives aux parties communes dont le coût est
également inclus
dans le loyer ;
De fait, dans un contexte où
l’intégration,
dans le loyer d’une surface de bureaux, du coût du nettoyage des
parties louées, ne ressort pas des usages, et sachant qu’une
telle inclusion aurait
pour effet
en l’espèce,
déjà en dehors du coût des autres charges communes,
d’amputer le
loyer mensuel de base – 495,79 € -
du montant de 200 € que la partie défenderesse affirme exposer
pour le nettoyage de ses locaux,
c’est-à-dire près
de sa moitié, donc une partie très substantielle, cette
dernière n’apporte
aucun élément probant précis attestant
d’une
inclusion du coût du nettoyage de
ses propres locaux dans le loyer dû, et, en particulier, d’une
prise en charge,
par la partie demanderesse, du coût des prestations jadis y
effectuées par la
concierge selon la partie défenderesse ;
Il importe aussi de faire
remarquer, de manière au demeurant surabondante, qu’en entendant
obtenir
expressément
la condamnation de la partie demanderesse à assurer, d’une part,
le bon fonctionnement des parties communes,
et d’autre, part, le nettoyage de
ces dernières, la partie défenderesse ne fait
elle-même qu’accréditer le fait de
la prise
en considération par les parties, au moment de la conclusion du
bail,
de ce qui constitue deux facettes d’une même
acception de la notion de charges
communes ; <>
En ce qui concerne les
dysfonctionnements, d’ordre technique, qui ont affecté
l’immeuble, force est de
constater
que la partie défenderesse qui, menaçait la partie
demanderesse, le 8
août 2005, de suspendre le paiement du loyer
à défaut pour la partie
demanderesse d’effectuer les réparations nécessaires
visées par le courrier
adressé à cette date
(portant sur l’ascenseur, la lumière de l’escalier et les
sonnettes), a poursuivi la rétention intégrale des loyers
après
que la partie
demanderesse eut procédé à la
quasi-totalité des réparations (c’est-à-dire
mi-décembre
2005, aux dires même
de la partie défenderesse), seul le parlophone demeurant
en panne ;
Cette poursuite ne se justifiait
plus en regard de ce courrier dès lors que les travaux dont
l’inexécution y
fondait
expressément, aux yeux de la partie défenderesse,
une éventuelle
rétention complète, étaient quasi
intégralement réalisés,
la persistance de la
panne du parlophone ne pouvant fonder, aux yeux du tribunal, une telle
rétention ;
Par
ailleurs, le tribunal
n’accorde pas de crédit aux affirmations de la partie
défenderesse, selon
lesquelles les
dysfonctionnements évoqués ont fortement
perturbé ses activités
et ses rapports avec ses clients et visiteurs
pendant la période
courant du 1er
juin au 15 décembre 2005 ;
En
effet, en dépit de
l’invitation qui lui en fut faite par le tribunal lors de l’audience du
31 mai
2006, la partie défenderesse
n’apporte aucun
élément, dont des points de
comparaison comptables, permettant d’étayer de manière
précise et probante
l’existence, sur ce point, du préjudice qu’elle évalue
à 10.000 € ;
Le
fait, pour la partie
défenderesse, d’attendre le 8 août 2005 avant d’adresser
ses doléances
relatives aux dysfonctionnements
susvantés, soit
déjà plus de deux mois après
leur constatation, l’absence de mise en œuvre effective de la menace
alors
clairement y exprimée, d’une suspension intégrale du
paiement des loyers à
partir du 1er septembre 2005, et d’introduction
d’une
procédure
judiciaire pour l’hypothèse où la partie demanderesse
serait en défaut d’y
remédier, démentent l’importance
du préjudice
affirmé par la partie
défenderesse, s’agissant de l’entrave porté, selon elle,
à l’accès proprement
dit des visiteurs
et de ses clients à ses locaux ;
Il
est indubitable que la crainte
ou le constat d’un impact sérieux de ces dysfonctionnements sur
les activités
de
la partie défenderesse n’aurait pas manqué de conduire
celle-ci à agir avec
diligence et prendre rapidement des
mesures concrètes en vue d’y
mettre fin, en
particulier en vue de limiter le préjudice
allégué, ce qu’elle n’a pas fait ;
La
rétention intégrale du loyer,
très différée nonobstant l’importance
alléguée du préjudice, sa poursuite après
que la partie demanderesse eut réalisé la
quasi-totalité des travaux
nécessaires pour mettre fin aux dysfonctionnements,
critiquée pour les raisons
exposées plus haut, l’évaluation faite du dommage
prétendument subi, sans
production du
moindre indice sérieux destiné à
l’étayer, révèlent aux yeux du
tribunal une attitude de la partie défenderesse contraire
à la bonne foi, purement
spéculative, et partant, illicite, une éventuelle
implication de la partie
demanderesse dans la
survenance ou la persistance des
dysfonctionnements
évoqués n’exerçant aucune influence sur cette
considération ;
Par
ailleurs, la partie
défenderesse, qui, de surcroît, ne conteste pas qu’elle
n’a pas constitué la
garantie locative
contractuellement prévue, ce qui constitue un
manquement
grave, ne convainc pas le tribunal lorsqu’elle affirme
qu’elle a
acquitté
régulièrement le montant du loyer jusqu’en octobre 2005,
dans la mesure où, à
l’inverse de celui
relatif aux mois de décembre 2004 et avril
2005, elle ne
produit pas la preuve du paiement du loyer afférent aux mois
d’avril et
novembre 2004 ainsi qu’à ceux de janvier et mars 2005 ;
S’agissant
des frais de
consommation d’eau réclamés, la convention de bail exclut
une intervention de
la partie
défenderesse en l’absence de compteur de passage, de
sorte que ces
consommations ne peuvent être établies
que sur l’existence
d’un tel compteur de
passage ;
La
partie défenderesse relève à
l’audience du 31 mai 2006 que la partie demanderesse n’a pas
communiqué de pièces
justificatives afférentes à ces frais, notamment une
facturation ;
Compte
tenu de ce qu’elle y
signale qu’elle honorera ces consommations sur base de la production,
par la
partie
demanderesse, de pièces probantes, il y a lieu de
réserver à statuer
quant à ce ;
En
ce qui concerne l’entretien de
la chaudière, le tribunal constate que le manquement
imputé à la partie
défenderesse n’est pas contesté par celle-ci ;
L’absence
de constitution de la
garantie locative, l’arriéré de loyer afférent aux
mois d’avril et novembre
2004,
ainsi qu’aux mois de janvier et mars 2005, la rétention de
loyer opérée à
partir de novembre 2005, jugée illicite,
révèlent
en réalité une inaptitude de
la partie défenderesse à faire face aux obligations
financières fixées par le
bail
et constituent en eux-mêmes des manquements graves
justifiant qu’il soit
fait droit à la demande de résolution du
bail aux torts
de la partie
défenderesse ;
Il
résulte de l’ensemble des
considérations qui précèdent qu’il y a par
ailleurs lieu de faire droit aux
autres chefs de
la demande de la partie demanderesse, sous
réserve de ce que,
d’une part, il ne peut être en l’état que
réservé à
statuer quant aux frais de
consommation d’eau relative aux années 2004 et 2005, de ce que,
d’autre part,
doivent être
déduits de l’ensemble des loyers
impayés les montants relatifs aux
mois de décembre 2004 et avril 200 (...) ;
PAR
CES
MOTIFS,
Condamne
la
partie défenderesse au paiement de l’arriéré de
loyers de 5.453,69 €, montant à
augmenter
des échéances d’avril et de mai 2006, de 991,58
€, et à diminuer ensuite
des montants versés par la
partie demanderesse, afférents
aux mois de décembre
2004 et avril 2005, le total étant à majorer des
intérêts conventionnels de 12
pour cent l’an ;
Condamne
la
partie défenderesse au paiement de l’arriéré
d’indexation, de 548,78 € ;
Réserve
à
statuer sur les consommations d’eau pour les années 2004 et
2005 ;
Prononce
la
résolution du bail (...) ;
(...)
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